Bien que battu aux primaires, Bernie Sanders reste très présent dans la campagne démocrate. Pour pousser Hillary Clinton à gauchiser son programme autant que possible, et pour continuer à peser après l’élection.
Normalement, lorsque l’on s’est fait battre de façon aussi nette que Bernie Sanders en juin dernier par Hillary Clinton, on disparaît au moins pendant un temps, celui de la campagne, derrière le candidat officiel. Mais ce n’est pas le cas pour Sanders. Dire qu’il est toujours au centre de l’attention des Américains serait aller un peu vite en besogne ; mais la dynamique qu’il a insufflée à la vie politique outre-Atlantique n’est pas encore retombée et surtout, il a réussi à faire prendre une tournure « un peu » sociale au programme de Clinton – Wait… really ?
Les compromis très tactiques d’Hillary Clinton
Quand Clinton parle aujourd’hui – timidement certes, mais tout de même – de la gratuité des community colleges, impossible de ne pas faire de parallèle avec les prêches de Sanders en faveur d’une éducation supérieure gratuite pour tous. Quand elle propose une « option publique » qui viendrait s’ajouter aux offres privées pour structurer le système de santé pour les plus pauvres, on se souvient des diatribes de Sanders pour une sécurité sociale universelle.
Il en va de même sur quelques autres sujets : le partenariat transpacifique sur lequel elle a revu sa position, quand lui a toujours été farouchement contre, l’augmentation du salaire minimum à 12 dollars quand lui le souhaitait à 15, la construction d’infrastructures publiques – mais ici encore, toujours avec plus de pincettes que le sénateur du Vermont.
Et tout cela, on ne va pas cracher dans la soupe, c’est déjà pas mal, même si on ne peut s’empêcher de remarquer que Clinton opte chaque fois pour une demi-mesure quand le prétendant Sanders penchait vers toujours plus de radicalité. Le seul problème face à toutes ces tentatives de Sanders pour influencer le programme de Clinton, c’est que ce n’est pas une femme politique au sens noble du terme. C’est une stratège qui élabore son programme comme on joue au strip-poker : en essayant qu’il ait l’air sexy, et avec beaucoup de bluff. Tant pis si l’on n’a même pas une paire de deux, car, avec un peu de chance, on n’aura même pas besoin de montrer son jeu à la fin.
La vague Sanders n’a pas reflué
Or, pour aller draguer les électeurs-supporters-fans de Sanders, rien de tel que des promesses de socialisme, même carrément édulcoré, puisque le rejet du candidat des Républicains Donald Trump est déjà, presque à lui seul, l’assurance d’une victoire. L’équipe de Clinton se préoccupe probablement plus de la manière de s’assurer, grâce à une victoire nette, les marges de manœuvre les plus durables possible. Et pour cela, il faut impérativement réveiller l’esprit qui a fait le cœur de la vague Sanders ; même si, en un sens, la gagnante de la primaire démocrate incarne tout ce que son rival entendait combattre…
[lire aussi : « Cette gauche qui ne votera pas Clinton »]
Mais Sanders, qui s’est officiellement rangé derrière Clinton et qui, depuis, a fait montre d’une grande loyauté dans le processus partisan de soutien à la gagnante – bien que ce ne soit pas toujours aisé – n’a pas dit son dernier mot : avec la sénatrice Elizabeth Warren, il essaie de trouver les moyens de peser sur la probable future présidente des États-Unis, notamment en rendant la plate-forme du Parti démocrate plus progressiste, plus sociale et, en un mot, plus de gauche.
Le but est quasi-officiel : forcer Clinton et son cabinet à ne pas poursuivre une politique de bienveillance à l’égard de Wall Street, de collusion des intérêts politiques et privés et d’ajournement de la résolution des problèmes sociaux qui secouent de plus en plus le pays. Et si Clinton restait sourde aux injonctions de Sanders, ce dernier a affirmé haut et fort qu’il n’hésiterait pas à afficher publiquement et vigoureusement son opposition. Et, vu la qualité de l’orateur et son aura nouvelle, ce n’est pas à prendre à la légère.



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