Comment le « communisme municipal » va-t-il sortir des urnes, dimanche, après un premier tour qui a confirmé certaines des positions du PCF, mais en a compromis d’autres ? Analyse sur les villes de plus de 3.500 habitants.
Depuis 1983, chaque scrutin municipal est suivi attentivement du côté du PCF. Il avait atteint son apogée en 1977, avec un total de 1.464 maires communistes ou apparentés sur le territoire métropolitain, qui administraient 16,7% de la population française. Depuis, la représentation communiste a continûment reculé. En 2008, le nombre de mairies est passé à 925, pour 5,6% de la population française. Mais, depuis 1995, le recul est sensiblement atténué. La résistance du « communisme municipal » est un fait.
Qu’en sera-t-il en 2014, dans un contexte très défavorable à la gauche ? Difficile, à l’issue du premier tour, de se faire une opinion stabilisée sur l’ensemble du territoire national. Les analyses présentées ici portent sur 185 communes de plus de 3.500 habitants, dont le maire sortant était classé communiste ou apparenté.
Villes conservées, perdues et en suspens
À l’issue du premier tour, le PCF a conservé près de la moitié de ses villes (90) et il en a perdu 24 (13%). Dans deux cas (Montigny-les-Cormeilles et Sevran, les villes les plus peuplées du groupe), le maire a changé d’étiquette politique entre deux élections. Les zones géographiques des pertes sont variées, avec une fragilité plus grande dans l’Ouest (Trignac, Auray, Ploeren), et dans le Nord-Pas-de-Calais (Feignies, Fenain, Pecquencourt, Quièvrechain, Auchy-les-Mines, Divion).
Dans 48 cas (25%), la liste dirigée par un communiste se trouve en position favorable, à peu près assurée d’une réélection au soir du second tour [Dans cet ensemble, peut s’ajouter la commune de Gattières, dans les Alpes-Maritimes, dont la maire sortante se dit désormais farouchement « sans étiquette »]. Reste donc une bonne vingtaine de cas (12%) dans lesquels la liste qui continue l’œuvre municipale engagée aborde le second tour dans une position défavorable (distancée au premier tour et sans réserve potentielle pour le second) ou dans des conditions de ballottage difficile (en tête, dans des configurations très disputées).
Il est à noter que, dans quatre cas (Saint-Christol-lès-Alès, Aniche, Houdain, Roissy-en-Brie), le maintien d’une candidature socialiste fait courir le risque d’un basculement à droite. De façon plus générale, le Parti socialiste n’a guère tiré profit de son bras de fer avec les mairies communistes sortantes (sauf à Audun-le-Tiche en Moselle). Mais, si l’on tient compte du désarroi général du PS, il réalise parfois des scores enviables, qui continuent de le placer en alternative possible contre les communistes, dans des villes meurtries par la crise.
La mobilisation, facteur déterminant
Lors d’une conférence de presse tenue au lendemain du second tour, Pierre Laurent a indiqué la possibilité de conquêtes à Corbeil (Essonne), Calais (Pas-de-Calais), Sète (Hérault), Die (Drôme), Thiers (Puy-de-Dôme), Sérémange (Moselle), Annay-sous-Lens (Pas-de-Calais), ainsi que Montreuil et Aubervilliers (Seine-Saint-Denis). Dans quatre cas (Thiers, Sérémange, Annay, Montreuil), la partie semble particulièrement jouable. Elle l’est, dans des conditions un peu plus difficiles, dans les quatre autres.
Tout va donc, bien sûr, dépendre de l’ampleur des mobilisations réalisées dimanche prochain. Au vu du premier tour, il est vraisemblable que le PCF connaîtra un nouveau fléchissement. Il peut être plus ou moins important. Manifestement, le communisme municipal résiste particulièrement bien en Meurthe-et-Moselle, en Seine-Maritime et dans les Hauts-de-Seine, où le quatuor Bagneux-Gennevilliers-Malakoff-Nanterre est inamovible. Il conserve ses positions de force dans le Nord-Pas-de-Calais, mais se trouve davantage menacé par l’érosion. Il restera le cas le plus décisif, celui de la petite couronne parisienne. C’est là que les positions sont les plus fragiles et que le second tour sera le plus déterminant.
Les derniers moments de l’union de la gauche traditionnelle
Les leçons générales pourront être tirées plus tard. D’ores et déjà, le premier tour a montré que le PCF n’était pas à l’abri du reflux général de la gauche. Mais ses capacités de résistance ne sont pas négligeables. Sans doute les communistes bénéficient-ils d’une capacité, plus grande que certains de leurs partenaires, à maîtriser l’équilibre délicat des données nationales (les effets des politiques publiques) et des configurations locales. Mais ils devront, eux aussi, réfléchir aux indications du scrutin de dimanche.
Manifestement, l’union de la gauche traditionnelle, celle qui fonctionne depuis 1965, vit ses derniers moments. Il faudra donc s’habituer à des dynamiques nouvelles de rassemblement, combinant le national et le local. De même, la demande de renouveau radical de la politique locale et du rapport entre citoyens et institution locale devrait être travaillée en profondeur.
Encore faut-il passer le cap du second tour. Dimanche soir, il se confirmera que, sur le plan local, les communes de sensibilité communiste constitueront le noyau d’une gauche bien à gauche. Souhaitons que ce noyau soit le plus dense possible.


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