Du 5 juillet au 13 juillet, le festival ariégeois Résistances propose une programmation stimulante de films pour interroger la question Rrom, ce qu’il peut y avoir de politique dans notre rapport à la forêt, l’exercice du pouvoir… Sans oublier de rendre hommage au Chili et à son cinéma, quarante ans après le coup d’Etat militaire de Pinochet. Autant de bonnes raisons de faire halte aux pieds des Pyrénées.
C’est le genre de festival de cinéma aux antipodes de la foire aux vanités cannoise, et dont on est heureux de relayer l’actualité. Depuis 17 ans, une équipe réunie en plusieurs collectifs propose d’interroger les problématiques politiques, sociétales, écologiques par le biais de films de fictions ou de documentaires engagés dans le réel. Pas de compétition, pas de prix du jury ou du public, pas de stars, de quoi regarder les films pour ce qu’ils ont à dire sur le monde sans l’habituelle démagogie festivalière. Avec à la clé la rencontre quotidienne des réalisateurs et réalisatrices invité(e)s à rendre compte de leur démarche, autant esthétique que politique, dans une ambiance plus proche de l’agora que du cirque de la conférence de presse promotionnelle.
Il faut dire que sur ces terres du bout de la France, l’esprit d’indépendance, de contestation des ordres établis, et donc de résistance ne cesse de souffler dans une joyeuse hérésie. Alors que la quasi totalité de la classe politique considère la présence et la circulation des Rroms comme un facteur de trouble, Résistances en fait l’un de ses axes de programmation, histoire de mieux comprendre le mode de vie non standardisés de ces européens depuis six siècles et d’interroger la vague d’intolérance qui déferle à nouveau sur le vieux continent et dont ils sont les premières victimes.
Si le questionnement sur l’exercice du pouvoir, via la présence de Pierre Schoeller qui viendra projeter l’ensemble de ses films, appartient à la mission de ce genre de festival, la programmation intitulée « le cri des arbres » éveillera particulièrement notre curiosité. Le propos du festival consiste ici à interroger cet espace mystique et mythique, ce havre de paix et d’harmonie perdu entre l’humain et la nature, De Brocéliande à la chaîne pyrénéenne, en passant par la forêt primaire du Laos. De quoi sortir des projections bien perchés.
La question démographique sera aussi de la partie, qui questionnera les différentes politiques, natalistes ou eugénistes ou, comme le dit l’équipe du festival « quand notre reproduction, notre corps et notre sexualité deviennent une affaire politique ». Commémoration des quarante ans du putsch de Pinochet au Chili oblige, Résistances accueillera enfin Nicolas Lasbinat, assistant du cinéaste national Patricio Guzman pour faire le point sur la situation cinématographique chilienne, entre devoir de mémoire, et volonté de tracer de nouvelles pistes politiques, narratives et esthétiques.
Signalons encore la projection lors de la soirée d’ouverture du deuxième long métrage de la française Rebecca Zlotowski, Grand Central, qui déploie les affres d’une histoire d’amour et de labeur à l’ombre des cheminées d’une centrale nucléaire, mais aussi la présence de Claire Simon, fabuleuse documentariste des Bureaux de Dieu sur une antenne de planning familial. Un festival à mille lieux du cinéma de l’oubli de soi et des autres. Un festival aux regards aiguisés.
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