Deux singes ou ma vie politique de François Bégaudeau

Il écrit comme il respire. C’est captivant. En dépit d’accents profondément irritants, détestables même ici et là, je me suis délectée en lisant sans en perdre une miette le dernier roman de François Bégaudeau, un récit autobiographique sur sa vie politique. Pour le pitch, rien de très original pourtant : énième histoire du militant de chaque instant qui, dans sa jeunesse, récitait son communisme comme un bréviaire puis, maturité et embourgeoisement aidant, s’interroge sur la profondeur de ses certitudes, les fondements de ses convictions, se dit que la vie est belle, c’est chouette, faut en profiter, et puis : « Tu sais je crois que fondamentalement ça ne changera plus » (dernière phrase du livre, sic). Même dans cette part d’autocritique, on le sent finalement content de lui. Et sûr de ses doutes comme de ses dernières convictions. Le récit n’en reste pas moins talentueux. D’abord parce que Bégaudeau a le verbe dans la peau. Ensuite parce que c’est un portrait générationnel, notamment évocateur pour les quadragénaires de mon espèce, pour celles et ceux que la passion à gauche a tenu, tient, tiendra ou lâchera. Non pas que nous puissions nous retrouver dans toute son analyse, ni même dans sa façon d’avoir fait vivre la politique dans sa vie, mais que la suite des événements qu’il brosse, brasse, correspond à nos propres étapes, repères. Enfin, Bégaudeau pointe certaines failles véritables de ce militantisme bien à gauche, de son discours, de ses postures, de ses pratiques. Il met le doigt sur ce qui participe de sa trop grande distance avec la possibilité majoritaire, que l’on pourrait résumer à la serpe par une fermeture à l’égard du monde contemporain et la délectation de la marginalité. Disons qu’au fond, Bégaudeau m’agace mais au moins il me fait quelque chose. Réfléchir.

François Bégaudeau, Deux singes ou ma vie politique, Verticales, 439 pages, 22 euros.

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