Un autre monde

La tourmente européenne reste devant nous. Le rapport
des forces au sein des pays de l’UE est toujours dominé
par une approche malthusienne et financière qui met dans
le mur les peuples, les pays et le projet européen lui-même.
L’idée qu’il faut trouver un autre chemin prend corps.
L’élection de François Hollande en est un indice. Mais la
clarté des solutions n’est encore ni évidente ni partagée.
Les faire émerger théoriquement et pratiquement suppose
une rupture telle, avec les politiques néoconservatrices
dominantes depuis 30 ans, que l’effort doit être général.
Il doit à la fois porter sur la construction programmatique
et sur la convergence politique, celle qui permet la
mobilisation de nouvelles énergies.

Il semble clair que, pour sortir de l’ornière, on doit contenir
les marchés. Or ce n’est que la première marche du
processus : il faut surtout inventer un autre mode de
développement, d’autres finalités et d’autres manières
de faire société. Les mouvements politiques alternatifs
qui émergent en Europe sont dans une assez grande
diversité de situations. Mais, ensemble, ils accumulent des
expériences qui constitueront les pierres de ce chemin.

Le mouvement des Indignés et son insistance sur
l’invention d’une « vraie démocratie », le Front de
gauche en France qui affirme « l’humain d’abord », le
positionnement audacieux de Syriza en Grèce, l’ancrage
de Die Linke en Allemagne, des alliances rouges et vertes
au Portugal, en Hollande, en Suède, les inventions des
Pirates qui insistent sur les libertés et la culture partagée…
sont autant de contributions à l’émergence de cet autre
monde. Le mouvement ouvrier tel qu’il s’est structuré au
xxe siècle n’a pas disparu. Il se prolonge dans des luttes
sociales contemporaines. Mais il se trouve embarqué dans
de nouveaux combats. Ces nouvelles gauches disent que
le désir d’émancipation n’est pas renvoyé aux rayons
poussiéreux du passé. Ils rappellent aussi que l’esprit
d’alternative manque d’allant s’il n’assume pas pleinement
l’exigence de novation.