Alain Corbin, Jean-Jacques Courtine, Georges
Vigarello
« Tu seras un homme, mon
fils », écrivait Kipling. Cette
injonction s’applique dès l’enfance
au petit garçon encore
« imberbe, gracile, faible, impubère
». Et guide l’ensemble
de sa trajectoire, jusqu’à l’acquisition
du muscle et du poil,
de la bravoure et de la loyauté.
L’article d’Ivan Jablonka sur
« l’enfance ou le voyage vers la
virilité » atteste d’une période –
le XIXe siècle – où les attributs
de la virilité connaissent leur
emprise maximale. Il est tiré du
deuxième tome (sur trois) de L’Histoire de la virilité dirigée par Alain
Corbin, Jean-Jacques Courtine et Georges Vigarello.
Après L’Histoire du corps, cet ouvrage interroge une notion qui ne
renvoie pas uniquement à la masculinité. Définie par les auteurs
comme un idéal de puissance et de vertu, d’assurance et de maturité,
de certitude et de domination, elle connaît des modifications
en fonction des contextes et des époques, des techniques et des
dispositifs sociaux. Entre le courtisan et le chevalier, la société militaire
et la société marchande, les codes se déplacent. Ainsi, la description
du « visage d’Adonis sur un corps d’Hercule » évoquée par
Voltaire met en scène une virilité nouvelle qui tente de se définir loin
des dominations passées… Sans toutefois se chercher dans un dialogue
avec les femmes ! Si la « virilité traditionnelle (…) est profondément
ébranlée par la culture des Lumières », selon les auteurs,
elle « ne l’est pas au point de transformer le statut du féminin » !
De ces trois volumes, on retiendra notamment l’idée que la virilité
n’appartient pas aux hommes. À ce sujet, l’article de Christian Biet
sur « L’équivocité des genres » dans le théâtre du XVIIe siècle est intéressant.
Il explique que « dans la comédie et la pastorale, la virilité
n’appartient pas aux hommes virils, ni de fait ni de droit ». « Même
si la domination sexuelle existe, poursuit-il, la virilité ne cesse de
transiter d’un sexe à l’autre, dans la mesure où elle s’origine dans
un genre. »
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