« DU CUL, DU CUL, DU CUL. » Les Guignols, qui fêtent leurs 20 ans de sévices publics, avaient ainsi résumé la philosophie de TF1 pour faire de l’audience.
Avec, en point d’orgue, des émissions de téléréalité comme « Le Loft » et les fameuses performances aquatiques des candidats. Mais de quel « cul » parle-t-on ? La libération sexuelle a depuis longtemps passé le cap de l’ambition politique pour devenir une machine à sous médiatique. Il fut un temps où le pouvoir virait une speakerine pour avoir montré ses genoux. Désormais, les directeurs de l’info choisissent les présentatrices du journal télé sur leur joli minois et leur décolleté. De la femme soumise à la femme objet ? Plus complexe que cela, et à la fois plus insidieux.
Cet été, deux émissions ont particulièrement démontré comment le sexe prétendument libéré pouvait servir à véhiculer en douce les discours les plus réacs sur le sujet. La censure vous emmerde car vous aimez vous rincer l’œil pour mieux jouer les moralisateurs ensuite à table ? On va vous montrer le pire pour mieux vous maintenir dans la tête vos préjugés. Montrer s’avère d’ailleurs un bien grand mot puisque étrangement, on suggère surtout, mais les images restent bien sages. A moins de considérer qu’à l’heure du porno gratuit sur le Net et du topless généralisé sur les plages, une paire de seins à 22 h 30 représente encore un scandale pour les bonnes mœurs.
Prenez « Secret Story ». Un parfait florilège des stéréotypes féminins et masculins. Avec, par exemple, dans le rôle de la « salope » assumée, une Cindy (cela ne s’invente pas, on dirait un feu 3615) plus blonde et allumeuse qu’un faux pseudo sur Meetic. Une femme qui veut coucher avec des hommes, merde, elle ne doit pas être normale, non (elle serait bi en outre, le pompon audimat) ? En face Sabrina, la fille bien, celle qui veut rester vierge, (je vous rassure, elle vient de la communauté des gens du voyage, cela se passe comme cela chez ces gens-là paraît-il, donc tout va bien !). Le machisme des clips de rap peut aller se rhabiller, car ici on ratisse large et le venin misogyne est beaucoup plus sournois.
Dans un autre registre, « Mon incroyable fiancé », deuxième version, a aussi explosé toutes les limites. Ici on a poussé le principe encore plus loin. Puisque la France semble avoir accepté le Pacs et que Paris a élu un maire homo, pourquoi ne pas exploiter le filon. Mais sur le mode comique, celui du quiproquo. Un petit texte avant le générique pour appeler à la tolérance et envoyez le bousin, comme diraient nos amis de Groland. Car L’idée de génie se situe ici : mettre mal à l’aise au maximum un pur hétéro (mais beau gosse quand même, il faut pas oublier le public féminin) en l’obligeant à convaincre sa famille qu’il est devenu gay et qu’il va se pacser avec un autre gars, en fait un acteur censé saboter ses efforts. Bien sûr avec, au bout, la carotte de 100 000 euros (faut au moins ça pour accepter d’en être, non ?). Le tout sous les conseils de « vrais » gays bien comme il faut. Vous suivez ? Au final, il paraît que Boutin ne rate pas un épisode… M.
VOUS REGARDEREZ EN SEPTEMBRE
« Pif Paf », l’émission sur la télé de Paris Première (le samedi à 17h45), légèrement moins beauf que Morandini sur Direct 8/ En septembre sur Canal+, Hunger, de Steve McQueeen, le film qui retrace la grève de la faim fatale de Bobby Sands et d’autres prisonniers de l’IRA en 1981, également disponible chez MK2 en DVD pour ceux qui ne sont pas abonnés à la chaîne cryptée/ Les journaux régionaux de France 3, ou l’on suit finalement le mieux les dégâts de la crise sur l’ensemble du pays.
VOUS NE REGARDEREZ PAS EN SEPTEMBRE
Le nouveau « Canal Football Club » avec Pierre Ménès (le dimanche à 19 h 20), car il sévit assez de commentateurs de droite comme cela à la télé/ Le retour d’Eric Zemmour peu importe la chaîne/ Plus belle la vie car l’OM va gagner le championnat, et point trop n’en faut/ Le journal télé sur M6, apparemment avec Mélissa Theurieu, le 7 septembre, s’il se met bien en place, car pas besoin d’un TF1 bis.
Paru dans Regards n°64, septembre 2009
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