Le communautaire ou l’écran plat !

IL FLOTTE COMME UN AIR DE VICHY MIXÉ À LA MODE COLONIALE SUR LES PLAINES DE FRANCE.

Fichiers ethniques et replis communautaires pendant que la France qui ne veut pas travailler le jour de son seigneur craint «l’importation» du conflit israélo-palestinien. Mais l’odeur des cités immigrées et le parfum de laïcité «positive» permettent-ils de faire de l’audience autrement que dans la course à la démago, façon Eric Zemmour ? Car si on regarde de plus près le paysage audiovisuel français, ce dernier nous démontre d’abord que, si chacun cherche son clan, personne ne veut bouffer uniquement en famille dans sa petite lucarne.

Avec l’arrivée du câble, de l’Internet haut débit puis de la TNT, la multiplication des canaux était censée fractionner une offre et multiplier les créneaux spécifiques. La réalité s’affirme au final à contriaro du sens commun. Ainsi, TFJ, la télévision française juive, est tombée aux oubliettes, et KTO, la télé catholique, s’avère constamment menacée. Et ne cherchez pas de petite sœur musulmane, ici le public «cible» préfère largement se reporter sur les télés de son «bled» , avec sa série brésilienne préférée en arabe, au pire Al Jazira pour les infos.

De fait, le syndrome communautaire, quel que soit le groupe concerné, semble systématiquement échouer en France (il faudrait nuancer dans d’autres pays, comme les Etats-Unis, où les communautés structurent en profondeur la vie sociale et culturelle). Pink Tv n’a pas réussi à s’imposer sur la durée et elle a dû abandonner ses grandes ambitions de départ pour vivre ou survivre du X. Personne n’est épargné, y compris dans les créneaux les plus larges. Ainsi Filles TV, qui ambitionnait de toucher les 12-18 ans, s’est récemment réorientée vers les 22-27 ans, en gros, sans le dire, toutes celles qui pensent avoir l’état d’esprit de cet âge-là (on s’approche de la ménagère de moins de cinquante ans).

Les causes de ces échecs à répétitions sont, bien sûr, nombreuses. La qualité des programmes laisse perplexe (sous-télé-réalités et magazines de faits divers à bas prix), surtout face à la concurrence des poids lourds hertziens, qui parfois marchent d’ailleurs ouvertement sur leur plates-bandes (série gay sur Canal +). Bref, si la TNT et ses petites chaînes viennent ouvertement bouffer les croupières publicitaires des grandes dames, de la Une à M6, c’est, surtout, non pas parce qu’elles se différencient, mais au contraire, parce qu’elles essaient dramatiquement de leur ressembler, de W9 à TMC ou NT1, y compris Téva (un ersatz télévisuel de Elle), avec, dans leurs grilles : enquêtes (sic) sur l’insécurité, vieilles séries des années 1980, pseudotéléfilms érotiques et foot de seconde zone. Tv Breizh, le hobby bretonisant de Patrick le Lay, n’a eu ainsi de cesse de gommer sa spécificité régionale pour balancer le meilleur ou le pire du TF1 d »il y a vingt ans.

Bref, le communautarisme ne gagne pas de terrain, dormez tranquille, mais la diversité est loin de s’imposer. La multiplication des chaînes ressemble à deux miroirs qui se reflètent mutuellement de plus en plus petits et insignifiants dans l’œil du spectateur. M.

On ne regardera pas (spéciale M6)

Paris 16, la nouvelle tentative de venir concurrencer Plus belle la vie, car franchement, qui rêve encore du 16e arrondissement parisien en période de crise ?/ «Pékin express» , ou comment recycler le colonialisme dans une téléréalité, au passage bidonnée comme les autres/ «La Nouvelle Star» , car les votes du public sont aussi valables que les partis-pris du jury.

On regardera
«Paris dernière» sur Paris Première (tous les vendredis vers 23h30), la visite nocturne de la capitale par Xavier du Moulin redevient presque intéressante/ La rediffusion des «20 ans» des guignols qui, par ailleurs, n’ont jamais été aussi bons que sur Eric Besson.

Guillon au pilon

On peut reprocher beaucoup de choses à Stéphane Guillon : taper sous la ceinture, choisir ses cibles selon leur potentiel à l’audimat ou feindre de ne pas appartenir à la bande médiatique qu’il brocarde. Toutefois, on a du mal à imaginer DSK véritablement contrit par de vagues allusions à sa libido, pas plus que le patron radiophonique de ce même humoriste puisse chuter sur ce point face à un président de la République jugeant ce genre de chronique «inadmissible» . Ou alors quelque chose pue vraiment dans notre démocratie. Stéphane Guillon «aggrave son cas» , éd. Points

Paru dans Regards N°61, avril

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