Surdité à droite. Solidité à gauche ?

Les Antilles ont donné une leçon de ténacité pour faire plier le gouvernement. A voir l’affluence en termes de participation et le soutien populaire (plus de deux Français sur trois) à la journée de grève générale du 19 mars dernier, il n’est visiblement pas question de mollir. La contestation prospère, la révolte s’affirme. Et ce d’autant plus que le gouvernement s’est enfermé dans un déni impressionnant face aux revendications portées. Confrontés à une succession de foyers de contestation, Nicolas Sarkozy et ses amis adoptent un ton moins péremptoire. Fini le temps où le président de la République affirmait en fanfaronnant : «Maintenant, quand il y a une grève, plus personne ne s’en aperçoit» . Si le mépris s’affiche avec plus de discrétion, le cap, lui, reste inchangé.

Pour l’heure, le gouvernement refuse de satisfaire l’une des revendications majeures portées par les syndicats et la gauche, à savoir l’augmentation des bas salaires et des minima sociaux. Le fétichisme de la logique capitaliste conduit à écarter le moyen de restaurer quelque peu le rapport capital-travail, en augmentant les revenus du plus grand nombre pour mieux partager la plus-value. La défense du service public, si utile par temps de crise où tous les leviers de la solidarité et de l’égalité doivent être confortés, ne fait toujours pas partie des priorités de la droite. Et alors que la crise sert de prétexte à bien des entreprises pour mettre dehors de nombreux salariés, le gouvernement n’envisage pas non plus d’encadrer davantage les licenciements. Quant à ponctionner les revenus financiers ou à s’attaquer

réellement à tous les «abus» des grands patrons qui osent encore se servir largement la soupe dans ce contexte dépressif, ce n’est pas plus à l’ordre du jour. Les coups de gueule sur les paradis fiscaux ou les stocks options ne font pas une politique. Pour preuve : François Fillon a clairement réaffirmé l’orientation gouvernementale, estimant qu’un effort de «pédagogie» sur les mesures engagées suffirait à calmer les Français en colère.

Certaines contre-réformes, comme la loi sur l’autonomie des universités ou le projet Darcos sur l’école, ont tout de même été renvoyées à plus tard. Mais la droite continue la fusion Assedic-ANPE, la loi Bachelot sur l’hôpital (transformé en hôpital-entreprise), les remises en cause sur le terrain de la justice pénale… Et pas touche au paquet fiscal : Frédéric Lefèbvre, porte-parole de l’UMP, ose même déclarer que la loi TEPA avec son bouclier fiscal est un «élément de justice» . On ne change pas une orientation qui perd… Haro enfin sur ceux qui attisent la mobilisation, perçue comme un désordre. Le Medef vient en renfort pour tenter d’inverser les rôles, en rendant la CGT responsable de la perte d’emplois !

Toujours est-il que le rapport de force est en marche. La résistance populaire est le meilleur moyen de déboucher les oreilles du gouvernement. Et sans doute aussi un élément décisif pour déclencher une dynamique solide à gauche.

C.A.** et **E.C.

Paru dans Regards n°61, avril 2009

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