PCF, l’après-congrès. Un pari difficile

Regards poursuit ses grands entretiens avec les principaux acteurs de la gauche alternative. Après Jean-Luc Mélenchon et Olivier Besancennot, ce mois-ci, Pierre Laurent. Celui-ci assume en bloc toute l’histoire communiste. Il mêle une orthodoxie d’organisation avec l’espérance d’une audace retrouvée. Est-ce possible ? Du neuf peut-il naître d’un parti en ordre ? Lui, le croit. Avec la rencontre de ces trois personnalités, il se construit comme une image de l’état actuel de cette gauche dont ils défendent les couleurs (1).

Jean-Luc Mélenchon, Olivier Besancennot, Pierre Laurent, trois personnalités contrastées incarnent la gauche de gauche. L’un s’enflamme à l’évocation de Jaurès, de sa promesse de réformisme radical, de République sociale. Il en épouse les attitudes, parle comme un tribun, cherche l’enthousiasme des foules. L’autre a la sécheresse et l’efficacité d’une gauche sans compromis. Ses idées sont directes. Pas négociables. Qui l’aime le suive et se rallie à son panache blanc. Le troisième, moins connu du grand public, est un enfant du communisme des années 1970, le meilleur. Chacun sait qu’il est le fils de Paul Laurent, dirigeant du parti au temps où le PCF chercha à inventer « le socialisme à la française » ; époque où siégeaient encore à la direction du PCF des syndicalistes et des intellectuels. Les communistes se convainquaient alors que la démocratie n’était pas si mal et qu’elle leur imposait de solides argumentaires. Ils se persuadaient que la crédibilité de leurs propositions était à la base de leur influence électorale. Il y a trace de tout cela dans le discours actuel du fils.

Jusqu’à sa promotion au rang de dauphin par l’actuelle secrétaire nationale du PCF, Marie-George Buffet, Pierre Laurent était directeur de la rédaction de l’Humanité. Le voilà coordinateur de la direction du parti. De l’avant-poste d’observation que constitue la rédaction d’un quotidien, Pierre Laurent a acquis une certaine connaissance de la société française et des enjeux internationaux. On peut lire des échos de cette ouverture de vue dans le texte officiel qui servit de base à la préparation du dernier congrès des communistes : Pierre Laurent en était le principal rédacteur.

A 50 ans, Pierre Laurent a tout appris, rien oublié. Il assume en bloc toute l’histoire communiste qu’il connaît parfaitement. Il mêle une orthodoxie d’organisation héritée des conceptions centralisées du parti à l’espérance d’une audace retrouvée. Est-ce possible ? Dans un parti en ordre peut-il naître du neuf ? Il le croit.

C’est, en un sens, cohérent avec sa formation d’économiste et avec l’idée qu’il se fait des succès passés. Il croit à l’analyse et à la déduction. Peu à l’invention qui suppose transgressions, digressions, erreurs et surprises. Il n’y a rien de tout cela sous la plume de Pierre Laurent, ni dans les réponses qu’il nous a faites. Pierre Laurent déroule savamment une culture qui a fait ses preuves. Au risque de louper l’essentiel du sujet : qu’est-ce que cela veut dire, prendre le parti du communisme aujourd’hui même ?

Dans la généralité et la rondeur des réponses, se niche aussi une difficulté à le dire. Pétri de conviction communiste, incorporée jusqu’à devenir naturelle, il partage avec beaucoup de ses camarades le sentiment que le communisme politique traverse une mauvaise passe, qu’il faut savoir tenir bon et que des jours meilleurs viendront.

Nous aimerions croire encore à cette promesse. Mais par prudence, nous travaillons à donner davantage d’acuité au regard sur la société, et de tranchant aux points de vue défendus et aux prises de position. Catherine Tricot

[[1. Est-ce seulement un hasard si les trois figures sont masculines ?
]]Paru dans Regards n°59, février 2009

Lire l’entretien de Pierre Laurent : https://wp.muchomaas.com/article/?id=3891

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