En ne se fiant qu’aux déclarations de Nicolas Sarkozy
, nombreuses, tapageuses, souvent contradictoires, certains pouvaient en douter. Désormais, les faits sont là : sa majorité met en œuvre une politique cohérente qui allie ultralibéralisme et contrôle social. Bien avant l’élection du président de la République, en mars 2004, Regards consacrait un dossier de une, dans l’un de ses numéros les mieux vendus des dernières années, au «concert libéral-populiste» de Sarkozy (1). Nous y sommes.
Le paquet fiscal adopté à l’été 2007, en tout début de mandature, est la première pierre d’un édifice cohérent servant le capitalisme et les plus riches, au détriment des catégories populaires et des insoumis. Depuis, le patient détricotage des acquis nés de l’après-guerre touche de nombreux domaines. C’est l’âge de la retraite repoussé à
70 ans, les franchises médicales ou la libéralisation du travail le dimanche. Signe aussi que nous ne sommes pas totalement dupes du décalage entre certains discours et la politique concrètement menée. Face à la crise, Sarkozy a eu beau déclamer: «Le marché qui a toujours raison, c’est fini» et plaider pour la «moralisation du capitalisme» , c’est bien un plan de relance qui fait la part belle aux banques et laisse sur le carreau les bas salaires qui a été adopté. Les minima sociaux n’ont même pas été augmentés alors que le pouvoir d’achat de ses allocataires est plombé depuis de nombreuses années. Une petite prime unique leur est consacrée, pour 3% du total du plan de relance! La misère… Le démantèlement des services publics, comme La Poste, soumise à une privatisation rampante, ou les universités promises à «l’autonomie», participe également de la politique de casse des solidarités collectives.
Servir le monde de la finance et diminuer les protections, cela va de pair avec un contrôle social accru. Il faut bien que se légitime et s’exerce la puissance de l’Etat… D’où le développement de l’autoritarisme. Au menu : surveillance de nos libertés, normalisation des comportements, remise au pas des insoumis, culpabilisation des vaincus du système. Concrètement, cette mise au pas se traduit par la création de fichiers en tout genre, une augmentation des violences policières et des incarcérations, l’instauration de peines planchers et de la rétention de sûreté, la pénalisation accrue de la récidive, la refonte des services de renseignement, la mainmise sur les médias à l’occasion de la réforme de l’audiovisuel, le mélange des genres, sécuritaire et médical, pour la psychiatrie… Sans compter l’oppression des sans-papiers et la poursuite de ceux qui les soutiennent, mise en œuvre par un «ministre de l’Identité nationale». Le contrôle accru et répété des chômeurs et des précaires, toujours présentés comme « profitant du système » vient parfaire ce triste tableau.
Contrairement aux apparences des mots, Nicolas Sarkozy démontre que le libéralisme économique n’est décidément pas le meilleur allié des libertés publiques. Et s’il continue, allez savoir ce qui peut se passer… D’après Le Figaro , les révoltes en Grèce lui ont donné des cauchemars: c’est par peur de la contagion qu’il aurait exigé de remettre à plus tard la réforme Darcos, combattue avec ardeur par les lycéens. Le président serait revenu du dernier Conseil européen à Bruxelles avec le sentiment que les conditions pouvaient être réunies d’un « Mai-68 européen ». Et pourquoi pas?
C.A.
[[1. Dont vous pouvez retrouver les archives sur https://wp.muchomaas.com
]]Paru dans Regards n°58 janvier 2009
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