Oubliez Julio Iglesias et son insupportable fils. Oubliez Las Ketchup, et leur énervante contribution au tube de l’été avec plages et bikinis. L’Espagne, pays rock, royaume de la techno, possède une scène musicale extrêmement riche, mais qui peine à s’exporter (à l’exception, peut-être, et malheureusement, de Ska-P), et reste peu ou mal connue de l’autre côté des Pyrénées. C’est tout l’enjeu d’une artiste telle que Bebe. À la fois typiquement espagnole dans la façon de réaliser sa pop, et suffisamment conforme aux critères mondiaux pour tenter une percée au-delà de Madrid, sa ville d’origine.
D’ailleurs, il faudrait plutôt parler de scènes musicales, un large pluriel, tant la géographie dicte sa loi en une kyrielle de microcosmes artistiques et tant le poids des régionalismes s’avère un clivage déterminant là-bas. Le pays Basque abrite ainsi un grand nombre de groupes de ska et/ou punk, fortement militants, souvent proches des nationalistes, voire fascinés par l’ETA. Les modèles de Kortatu puis de Neggu Gorriak (et leur label Esan Ozenki), autour de leur leader Fermin Muguruza, ont profondément marqué les esprits. La Catalogne n’est pas en reste avec une multitude de formations de qualité comme Dr. Calypso (reggae) ou Opcio K-95 (oi). Mais étrangement, si la péninsule ibérique représente une plaque tournante, elle le doit surtout aux grands festivals qu’elle accueille tous les étés (le climat explique cet engouement). Ainsi Benicassim est devenu le point de ralliement de tous les amoureux de la pop et du rock, dont l’écho débute lors des fêtes qui s’organisent avant sur Paris.
Autre réalité, si l’Espagne constitue une terre d’élection de la techno et des musiques électroniques au sens large (comme en témoigne le festival Sonar avec ses quatre jours de fête rassemblant 100 000 personnes), elle le doit surtout à sa culture festive et à l’importance du clubbing, jusque dans ses travers les plus abominablement commerciaux. Ainsi Ibiza représente sans aucun doute le temple insulaire de la house, au point de susciter un style particulier appelé balearic. Mais peu d’artistes espagnols surgirent de cette effervescence, alors qu’en dépit d’un background beaucoup plus restreint, la France réussit à accoucher de la french touch et d’artistes internationalement reconnus comme les Daft Punk.
Triste constat, en dépit d’une passion dévorante de la chose, l’Espagne peine à devenir un grand pays de musique. Il lui reste le football…
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