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Apprendre l’opéra Dans un abondant programme, le Festival d’automne à Paris présente plusieurs opéras chinois. L’occasion de pénétrer dans les coulisses de l’histoire de ce grand genre dramatique qui remonte à l’Antiquité.
Si l’opéra chinois est très ancien (il a pour origine les cérémonies religieuses de l’Antiquité, ainsi que l’évocation, à travers des chants et des danses, de personnages mythiques et historiques), l’opéra de Pékin est jeune. Il a une histoire de deux cents ans seulement, mais, comparé aux autres opéras, il a connu un développement rapide. C’est grâce à l’empereur Qianlong, qui régna de 1736 à 1795, sous la dynastie des Qing (1644-1911) que, par un heureux concours de circonstances, l’opéra de Pékin vit le jour. Lors d’une inspection au sud du Hangtsé, l’empereur assista à une représentation d’un opéra local qui lui fit une forte impression. En 1790, pour fêter son quatre-vingtième anniversaire, il convoqua à Pékin plusieurs troupes d’opéra de différentes régions, dont quatre, excellentes, de la province de l’Anhui. Les quatre troupes s’installèrent à Pékin, et détrônèrent peu à peu l’opéra Kunju (1), l’opéra de Pékin tel que nous le connaissons.
Sobriété du décor, faste des costumes, symbolique élaborée
Le chant (qui nécessite de vraies performances vocales), le récitatif (chaque syllabe doit être soigneusement articulée), la musique instrumentale d’accompagnement (fracassante, souvent, avec gongs, tambours, instruments à cordes), la pantomime et l’acrobatie sont les composantes essentielles de l’opéra de Pékin. Les rôles traditionnels, incarnés par des acteurs masculins ou féminins, se divisent en quatre types: le sheng (les hommes), le dan (les femmes), le chou (les clowns) et le jing (les visages peints). Certains maquillages font penser à des masques. Ce qui fascine le spectateur occidental, c’est d’abord l’extrême économie de moyens (souvent, pas de décor, des rideaux de fond, une table et deux chaises…), laquelle permet une symbolique et une stylisation très élaborées. Le fouet est le cheval, le mouvement est la rivière, le pas dit la montagne, il suffit de quatre généraux avec quatre soldats portant des drapeaux pour évoquer une armée… Les costumes fastueux, qui obligent à un maintien solennel (au contraire des vêtements légers des acrobates), sont généralement ceux qui étaient portés sous les Ming, au XVe siècle.
L’ancien répertoire revisité par l’esprit socialiste
L’opéra de Pékin est riche de plusieurs milliers de pièces. Après la Libération, dans un esprit de modernisation socialiste, d’importants changements eurent lieu dans le choix et la représentation de l’ancien répertoire: remaniements des pièces à tendance féodale, suppression des intermèdes burlesques, des passages érotiques, des gestes licencieux, des allusions anti-féministes, sexistes, etc. On redonna la vie à de vieux opéras tombés dans l’oubli, on créa de nouvelles pièces historiques et modernes. Des débats passionnés opposèrent des spécialistes de l’opéra autour de l’évolution du genre. Les réformateurs furent accusés de vouloir » mettre un vin nouveau dans une vieille bouteille « … Récemment, l’adaptation du fameux opéra la Légende du serpent blanc a relancé la polémique. C’est ce qu’on fait de mieux, ou de pire, selon les points de vue, en matière de modernisation. Trois heures de spectacle réduites à 70 minutes, » effets spéciaux « , plate-formes mobiles, lumière noire, machines à fumée, musique enregistrée (!), ballets (modernes) surajoutés, etc. Il paraît que l’opéra de Pékin est en déclin, et qu’il faut le rendre attractif aux jeunes…n S. B.
1. Deux opéras Kunju sont donnés dans le cadre du Festival
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